الشيخ عبد الحميد بن باديس

Cheikh Abdelhamid Ibn Badis – الشيخ عبد الحميد بن باديس

Réformateur, intellectuel et éducateur religieux Abdelhamid Ibn Badis, est considéré comme l’un des plus grand savant religieux du siècle dernier. Président de l’Association des Oulémas musulmans algériens, figure emblématique du mouvement réformiste musulman en Algérie, Ibn Badis est né le 5 décembre 1889 à Constantine où il mourut le 16 avril 1940.

C’est dans sa ville natale qu’il apprit le Coran selon les usages traditionnels et les bases de ses connaissances en langue et littérature arabe, ainsi que celles des sciences de la religion islamique. Elève à partir de 1908, de l’Université Zeitouna à Tunis. Après avoir obtenu son diplôme en 1912, Abdelhamid va enseigner pendant une année à la Zitouna, conformément aux usages appliqués par cette prestigieuse université tunisienne.

Il accompli le pèlerinage à la Mecque et Médine et durant son séjour dans les lieux saints de l’islam, il va approfondir ses connaissances et côtoyer les savants de l’époque. De retour en Algérie, il se consacra d’abord, de 1913 à 1925, à l’enseignement et à l’action culturelle, avant de vouer toute son énergie à la réforme de la pratique religieuse dans le pays.

Un grand réformiste

Le mouvement réformiste se développa en Algérie pendant l’entre deux guerres mondiales grâce à l’action de Ibn Badis et d’un groupe d’anciens élèves et de compagnons, loyaux et fidèles, disciples formés dans leur majorité à Tunis ou au Moyen-Orient.

Le but de Ibn Badis, maître à penser et leader animateur du groupe de ses compagnons, alliant une intégrité et une probité intellectuelle sans failles à un amour passionné pour l’Algérie, sa langue et sa religion, était d’épurer l’Islam algérien de toutes les pratiques non conformes au Coran et à la Sunna, les deux seules sources dogmatiques de la religion. Tous ces hommes dévoués et volontaires désiraient, avec les outils de l’éducation, le livre, la presse, revivifier l’orthodoxie des premières splendeurs de l’Islam tout en la conciliant avec les perspectives d’ouverture d’un modernisme modéré.

Ses œuvres et actions

De 1913 à 1925, dès son retour au pays, Abdelhamid Ibn Badis va consacrer tous ses efforts et ses talents remarquables d’éducateur à l’enseignement la littérature, l’histoire, la géographie, disciplines civiques et religieuses. Son action pédagogique cible aussi bien la jeunesse, garçons et filles, que les adultes:

  • En 1917, il aménage un cours public dans la mosquée deSidi Qammoûch, à Constantine.
  • Toujours dans sa ville natale, au siège de la Société de Secours musulman, avec le concours de ses premiers disciples, des cours du soir pour adultes sont dispensés, et les langues arabe et française étaient au programme.
  • En 1918, Ibn Badis, en véritable manager, envoya à l’Université de la Zitouna à Tunis, la première promotion d’un groupe d’étudiants algériens qui seront appelés à constituer les cadres de l’enseignement libre, ouvrant la voie à des missions d’études programmées périodiquement.
  • En 1919, à Sidi Boumaza, la première école de filles est ouverte sous son impulsion. Ibn Badis se chargera lui même, avec le concours de Moubarak Al-Mili, de dispenser les cours, comprenant très tôt que l’instruction des filles est un paramètre incontournable pour tendre à la renaissance de la société algérienne.

Parallèlement à ses intenses activités socio-éducatives, Ibn Badis, avec sa clairvoyance habituelle doublée d’un remarquable pragmatisme, va investir dans une première étape les espaces socioculturels en milieu urbain :

  • Il encourage, organise et parraine l’éclosion de nombreuses troupes théâtrales et des formations sportives.
  • Il a été l’un des premiers leaders à avoir su comprendre l’apport considérable qu’on pouvait tirer du mouvement scout pour encadrer et structurer l’organisation de masse des jeunes.
  • Des centres culturels voient peu à peu le jour, toujours sous son instigation et son égide dont le plus célèbre, le Cercle du Progrès, à Alger était animé par Tayeb Al-Oqbi, un fidèle compagnon du Maître.

Dès 1925 il publia le journal Al-Muntaqid  -le Censeur- et c’est dans les colonnes de ce périodique que lui et ses compagnons commencèrent à diffuser les idées réformistes. Le journal jugé subversif par l’administration coloniale fut interdit à son 18ème numéro. Toujours opiniâtre, Ibn Badis créa par la suite d’autres publications périodiques. La plus célèbre reste Ach-Chihab -Le Météore-   qui  va offrir une grande tribune médiatique à la propagation du discours Badissien et parut de 1925 à 1939.

La création d’écoles où était enseignée la langue arabe et les principes d’un Islam rénové, fut le deuxième moyen d’action utilisé par Ibn Badis et ses partisans. Si en 1934-1935, le journal Ach-Chihab annonce la création, jusqu’à cette date, de 70 écoles -d’une ou deux classes réparties dans différentes régions du pays avec 3000 élèves inscrits- l’Association des Oulémas, qui sera créée en 1931, publia en 1950 la liste de 124 écoles avec un corps éducatif constitué de 274 maîtres. En 1954 la même association relève un nombre de 40.000 élèves fréquentant ses établissements scolaires. Elle créa à Constantine en 1947 l’Institut Ibn Badis, établissement secondaire qui formera des enseignants et des élèves appelés à être envoyés poursuivre leurs études à Fès, Tunis et au Moyen-Orient.

L’association des Oulemas Musulmans

Pour exercer son action et réunir toutes les bonnes volontés engagées dans la lutte pour le renouveau de l’Islam, Ibn Badis et ses compagnons s’unirent en 1931 aux cheikhs des confréries religieuses importantes pour créer l’Association des Oulémas musulmans algériens. C’est au Cercle du Progrès, en 1931 à Alger, lors d’une réunion de l’Assemblée générale constitutive de l’Association des Oulémas Musulmans regroupant les compagnons, les disciples, les sympathisants et les délégués de l’intérieur du pays autour du Maître, que Abdelhamid Ibn Badis a été élu Président de cet organisme. Au premier conseil d’administration siégeaient :Tayeb Al-Oqbi, Moubarak Al-Mili, Bachir Al-Ibrahimi, et  Larbi Tébessi.

Ibn Badis et ses compagnons ne cessèrent de proclamer l’appartenance arabo-islamique du peuple algérien. Ainsi, ils se mobilisèrent par l’enseignement et la propagation de la culture arabo-islamique pour servir la patrie algérienne. L’entreprise intrépide des réformistes religieux réussira à mettre un frein à la dépersonnalisation du peuple algérien et à sa division. L’objectif suprême du Cheikh était fondé sur la sauvegarde de la personnalité d’une Algérie, unie et en symbiose, dans ses spécificités ethniques, religieuses et culturelles …indivisées et indivisibles (avec pour slogan énoncé dans la célèbre triade, l’Islam est notre religion, la langue arabe est notre langue, l’Algérie est notre patrie).

A l’opposé de certains membres de l’Association des Oulémas Musulmans Algériens, Ibn Badis ne fit jamais preuve de violence verbale envers ses adversaires, y compris envers les cheikhs de zaouïas. Plus serein que la plupart de ses compagnons, plus tolérant, plus ouvert et d’une modestie et d’un détachement de soi quasi mystique, durant toute sa vie d’intellectuel il fut engagé sur les fronts qui furent les siens. Son grand projet fut de fonder une société réformée dans ses fondements religieux et culturels. Il montra la même attitude généreuse et magnanime envers les autres ethnies et religions du pays, ne se départissent jamais d’un profond humanisme tirant son essence et sa quintessence de ses croyances religieuses, et des enseignements précieux de sa somme culturelle qu’il avait acquise précocement, dans son pays d’abord, puis lors de ses voyages d’études initiatiques dans le monde arabe.

Pour honorer la mémoire et l’œuvre de ce grand savant que fut le cheikh Abdelhamid Ibn Badis, une journée a été instituée par les pouvoirs publics algériens le 16 avril : « Youm El 3ilm » (journée de la science).